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26 janvier 2013 6 26 /01 /janvier /2013 13:27

Après le décès de Guillaume 1er de Melun le 27 octobre 1329, Pierre Roger est élu archevêque de Sens le 24 novembre 1329.

 

Pierre Roger est né en 1292 à Rosiers-d’Egletons (a) de Guillaume ROGER (b), premier du nom, seigneur de ROSIERS, dans la terre de MAUMONT, comte de BEAUFORT et de Guillemette de la MESTRE (c)..

 

(a) aujourd'hui commune de Corrèze (19), région du Limousin, diocèse de Tulle

(b) ou ROGIERS

(c) Armorial du Limousin. Il y a une erreur dans Gallia Christiana quand au nom de ses parents.

 

Mais revenons à Pierre Roger. Dès 1302, il est alors âgé de 10 ans, ses parents l'envoient chez les bénédictins de l'abbaye de la Chaise-Dieu. C'était un élève brillant qui sera rapidement remarqué par les moines. Il continuera ses études à Orléans puis à Paris.


Son ascension est alors spectaculaire : en 1315, il professe à la Sorbonne, en 1326, il est successivement abbé de la Chaise-Dieu, prieur de Saint-Pantaléon au diocèse de Limoges, puis de Saint-Basle près de Nîmes, abbé de Fécamp, et enfin évêque d'Arras de 1328 à 1329. Le 12 mars 1329, il est nommé par le roi conseiller au parlement de Paris.

 

Pierre Roger, archevêque de Sens


A 37 ans, c'est très probablement le plus jeune archevêque de Sens. Il restera peu de temps à ce poste : 13 mois seulement, du 24 novembre 1329 au 14 décembre 1330. Il n'est pas certain non plus qu'il ait beaucoup résidé dans son nouveau palais. A cette époque les archevêques résidaient à l'abbaye de Saint-Pierre-le-vif de Sens.

 

Clément VI - 1329 Roger Archevêque de Sens

  Blason de l'archevêque Pierre Roger

photo Arnaud BUNEL (1)

 

Blason de la famille de MAUMONT : D'argent à bande d'azur accompagnée de 6 roses de gueules boutonnées d'or, 3 en chef et 3 en pointe.

Son sceau d'archevêque de Sens devenait donc : Archevêque mitré accosté d'un écu à croix cantonnée de quatre crosses en pal accostées deux à deux (diocèse de Sens), timbré d'une mitre, et d'un écu à une bande accompagnée de six rose posées en orle (Roger).

 

L'année précédente mourait le roi Charles IV le Bel. Cet évènement devait créer un grave problème de succession pour la couronne de France. Il servira de prétexte au déclenchement de la guerre de Cent Ans quelques années plus tard.


C'est finalement Philippe VI de Valois qui montera sur le trône le 29 mai 1328. Sa première épouse Jeanne de Bourgogne était dame de Courtenay, ce qui fut bénéfique à Sens et au Sénonais.

 

Dès sa prise de fonction, le nouvel archevêque se distingua à plusieurs occasions à l'« Assemblée de Vincennes ». De quoi s'agissait-il ? C'était une assemblée de notables créée par Philippe VI pour apaiser les conflits de compétences entre juridictions laïque et ecclésiastique en matière temporelle. Convoquée dès le 1er septembre 1329, elle tint plusieurs réunions à Vincennes jusqu'en janvier 1330.

 

Lors de ces réunions, Pierre de Cugnières, légiste, avocat au parlement de Paris va plaider pour les droits du roi contre les ecclésiastiques. Bien entendu, ces interventions ne vont pas plaire à tout le monde. Son nom sera tourné en dérision et rebaptisé Jean du Cognot, écrit avec quelques variantes. Une tête sculptée, insérée dans les colonnes à l'entrée de plusieurs églises vilipende ce personnage.

 

Clément VI - Jean du Cognot La légende

 

Clément VI - Jean du Cognot - dans la cathédrale

 

Depuis mars 1329, Pierre Roger était conseiller au parlement de Paris, mais en cette année 1335, le roi le nommera Chancelier et Garde des Sceaux.

 

Guillaume II de BROSSE lui succède à l'archevêché de Sens.

 

Le titre d'archevêque de Rouen de 1331 à 1338 est purement honorifique. Par contre, il habite Paris où ses obligations politiques et diplomatiques le retiennent auprès du roi.

 

Encore une nomination, le 18 décembre 1338, le pape Jean XXII le fait Cardinal-prêtre de Saint-Nérée et Saint-Achille.

 

En décembre 1352, devenu pape sous le nom de Clément VI, il fait bâtir dans l'église de Sens une chapelle dédiée à Saint-Martial, premier évêque de Limoges qui évangélisa le Limousin au IIIe siècle. On remarquera la fidélité à ses racines.

 

Clément VI - Chapelle Saint-Martial

  Chapelle Saint-Martial

Photo de l'auteur

 

Les souvenirs entreposés dans cette chapelle sont tous postérieurs au XIVe siècle, et n'ont rien à voir avec ce pape. Seul le vitrail lui est attribué, mais a été malheureusement très mal restauré au XIXe siècle.

 

Clément VI - DSC00465Vitrail de la chapelle Saint-Martial

Photo de l'auteur

 

Clément VI avait tenu à faire figurer sur le vitrail de gauche à droite : saint-Philippe, saint-Martial, la Vierge et saint-Jacques. Dans l'état actuel sur la photo ci-dessous, ils sont surmontés des armes stylisées à la pointe des 2 lancettes.

Théodore Tarbé donne la description des blasons avant la restauration du vitrail : « Dans le vitrage, on remarque 2 écussons, dans l'un sont 2 clefs en sautoir, et dans l'autre les armes de Pierre Roger, avec une tiare au dessus ».

Aujourd'hui ces éléments ont disparu, et ont été remplacés par d'autres motifs. On est en droit de se poser des questions ...

 

Clément VI - Détail du vitrail de la chapelle Saint-Marti

Détail du vitrail de la chapelle Saint-Martial

Photo de l'auteur

 

Pierre Roger, pape en Avignon


Apprenant le décès de Benoit XII, Philippe VI dépêcha un émissaire, le duc de Normandie, pour influencer la Sacré Collège en faveur de son candidat le cardinal Pierre Roger.

 

Jacques LONGUEVAL dans son ouvrage : « Histoire de l'Église gallicane » raconte l'élection du pape :

 

« La vacance du trône apoftolique ne dura qu'onze jours ; le douzième donna à l'églife un nouveau chef. Il y avoit à Avignon dix-huit cardinaux : dix-fept entrerent au conclave ; le feul cardinal de Montfavés s'en abfenta à cause de fa mauvaife fanté. C'étoit le 5 mai : dès le 7 les fuffrages fe réunirent fur le cardinal Pierre Roger, qui prit le nom de Clément VI, & qui fut le quatrième pape réfidant à Avignon ».

 

Dans l'assistance, on relève la présence de Guillaume ROGER comte de BEAUFORT, frère du pape et de son fils Guillaume ROGER vicomte de TURENNE.

 

Clément VI

Clément VI

Photo Wikipédia

 

Clément VI - 1342, Blason de Clément VI

Blason de Clément VI

Photo Arnaud BUNEL (1)

 

Le palais de son prédécesseur ne lui plaisait pas, pas assez digne de lui. Il convoqua un architecte français originaire de sa région d'origine afin de définir avec lui tous les agrandissements et transformations nécessaires. On peut l'admirer aujourd'hui dans cet état. Il fut surnommé Clément VI le Magnifique pour son sens du faste et de l'opulence.

 

Clément VI - Façade du Palais des PapesFaçade du Palais des papes à Avignon

Photo Wikipédia

 

En février 1343, Il négocia le rattachement du Dauphiné à la France. Le 9 juin 1348, il achetait Avignon et ses territoires à la reine Jeanne de Sicile.

 

Clément VI - Armes de Clément VI sur la Porte Champeaux

Armoiries de Clément VI sur le palais des Papes à Avignon

au dessus de l'entrée principale

photo de l'auteur

 

Lors de la terrible épidémie de peste en 1348, il offrit sa protection aux Juifs accusés d'en être la cause.

 

Pendant le pontificat de Clément VI, plusieurs membres de sa famille furent abbés de La Chaise-Dieu et évolueront vers des carrières ecclésiastiques de haut niveau :

  • Pierre d'AIGREFEUILLE, son cousin, qui fut ensuite évêque de Clermont, puis d'Uzès et d'Avignon,

  • Étienne MALET, apparenté aux LA TOUR-MAUBOURG en Velay, également un de ses cousins, futur évêque d'Elne, puis de Tortosa,

  • Étienne d'AIGREFEUILLE, frère de Pierre, mort en 1361.

  • son neveu, Pierre ROGER de BEAUFORT, régnera de 1370 à 1378 sous le nom de Grégoire XI. Né comme lui en Limousin en 1332, il ramènera définitivement la papauté à Rome le 17 janvier 1377. Il y finira ses jours en 1378. Dans ses dernières volontés, et tout comme son oncle, il souhaitait être inhumé à la Chaise-Dieu, mais les Romains s'y opposèrent. Il est enterré dans la nécropole papale sous la basilique Saint-Pierre de Rome.

 

Le 20 février 1352, à la demande d'Étienne d'AIGREFEUILLE, son cousin, abbé de la Chaise- Dieu, il fait refaire la dite abbaye dans l'état où elle est encore aujourd'hui.

  

Après un pontificat de 10 ans, Clément VI meurt à Avignon le 6 décembre 1352. Pour respecter ses dernières volontés, il sera transporté le 8 avril 1453 à la Chaise-Dieu et inhumé dans le chœur de l’abbatiale.

 

Clément VI - Gisant du pape dans l'abbatiale de la Chaise-

Cliché Wikipédia

 

Il sera remplacé à la tête de l'église catholique par Innocent VI.

 

Ouvrages consultés

FISQUET Henri, La France pontificale (GALLIA CHRISTIANA), histoire chronologique et biographique des archevêques et évêques de tous les diocèses de France depuis l'établissement du christianisme jusqu'à nos jours, divisée en 17 provinces ecclésiastique. Repos libraire-éditeur à Paris, 1864.

 

BOUVIER Henri abbé, Histoire de l’Église et de l'Ancien Archidiocèse de Sens, tome II de 1122 à 1519 ; imprimerie Yvert et Tellier à Amiens, 1911

 

LONGUEVAL Jacques, Histoire de l'Église gallicane: dédiée à nos seigneurs du clergé, depuis l'an 1320 jusqu'à l'an 1357, volume 13, rédigé avec Pierre Claude Fontenay, Guillaume François Berthier, Pierre Brumoy, 1783

 

TABBAGH Vincent, Fasti Ecclesiae Gallicanae, Répertoire prosopographique des évêques, dignitaires et chanoines de France de 1200 à 1500, tome XI, Diocèse de Sens, CNRS éditions Brepols, 2005

 

TARBE Théodore – Description de l'église métropolitaine de Sens ; recherches historiques et anecdotiques sur cette cathédrale, sur sa fondation et ses embellissements, éditeur Tarbé à Sens,1841. Ouvrage disponible sur internet

 

Bulletin de la Société Scientifique, Historique et Archéologue de la Corrèze, tome 11, imprimeur Roche à Brive, 1889. Ouvrage disponible sur internet

 

(1) Un remerciement spécial pour Monsieur Arnaud qui est l'auteur de ces blasons. voir son site : http://www.heraldique.org/2012/12/commemoration-du-deces-du-pape-clement.html

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13 janvier 2013 7 13 /01 /janvier /2013 21:06

Parmi toutes les publications parues pour le 600e anniversaire de la naissance de Jeanne d'Arc, j'ai été séduit par cette revue qui allie intérêt, sérieux, et  richesse de l'illustration.

 

JDA

Il s'agit là du n°3 de novembre, décembre et janvier 2013. Les 2 premiers numéros sont encore disponibles


Au sommaire :

  • Fêtes johanniques, expositions, monuments …

  • Le sacre de Charles VII

  • L'église de Lunéville

  • L'université de Paris au XVe siècle

  • Les armures de Jeanne d'Arc

  • Potin de Xaintrailles et Lahire

  • La statue de Frémiet

  • De l'arc au canon

  • Les vêtements de Jeanne

  • Légende et rumeur publique du vivant de Jeanne

  • Vaucouleurs, la cité qui arma Jeanne d'Arc

Bonne lecture !

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12 janvier 2013 6 12 /01 /janvier /2013 20:52

1429, Jeanne d'Arc et Charles VII

 

Le sacre du roi Charles VII à Reims le 17 juillet 1429 résonne comme l'aboutissement du parcours de Jeanne d'Arc. Il devait faire oublier toutes ces années de honte depuis le traité de Troyes. Mais Il n'en était rien. Il faudra encore attendre vingt-quatre longues années de guerre avant que ne sonne la fin de la guerre de Cent Ans.

 

Suite à ce jour mémorable, le convoi prend la direction de l'abbaye de Saint-Denis où le roi souhaitait loger. Jusqu'à la fin août, plusieurs villes picardes seront reprises par les Français : Soissons, Crécy, Château-Thierry, Senlis et plusieurs autres.

 

Du 5 au 10 septembre a lieu le siège de Paris. Le 8, pendant l'assaut de la porte Saint-Honoré, Jehanne est blessée, probablement légèrement. La capitale est occupée par l'Anglais et son allié Philippe, duc de Bourgogne, dit « le Bon ». Dès le 10, tout le monde se replie à Saint-Denis que Jehanne quitte le 12. Enfin, elle rejoindra l'armée royale le 13 à Lagny.

 

JdA Siège de Paris

  Jeanne d'Arc à l'assaut de Paris

Martial d'Auvergne, Vigiles de Charles VII

Paris, BnF, département des Manuscrits, Français 5054, fol. 66v.

 

Chevauchée de Jeanne dans la grande Sénonie

 

Dans la soirée du 13, Provins est en vue. Après avoir délogé la garnison anglaise, elle entre dans la ville qui réserve un accueil favorablement au roi. Avant son départ, Jeanne entend la messe à la collégiale Saint-Quiriace.

 

Le 14, Bray l'accueille. La cité possède le seul pont sur la Seine non occupé par l'ennemi.

 

Nous arrivons en vue de Sens, et je laisse Maurice ROY continuer le récit du voyage :

« Jehanne arrivait dans la soirée du 15 septembre par Sergines sous les murs de Sens non loin de l'abbaye Sainte-Colombe, devant la porte Saint-Didier. Mais la cité fermée depuis 10 ans, se trouvait toujours sous la domination anglaise ... »


Andrée MIGNARDOT dans son ouvrage sur Michery précise :

« le 15 septembre, le cortège passe à Sergines et s'engage sur le territoire de Michery en empruntant « le petit chemin Péré », encore appelé « le vieux grand chemin de Bray à Sens »


Une plaque posée sur l'église Saint-Didier de Sens hors les murs, rappelle cette page d'histoire :


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cliché de l'auteur

 

« Jeanne d'Arc, retournant de Senlis vers la Loire, est venue le 16 septembre 1429 à la porte de Sens. La garde anglaise ayant refusé le passage, elle franchit l'Yonne a gué un peu au-dessous de la ville ».


 Il faut noter que l'association johannique et le comité des fêtes du 500e anniversaire en 1929 n'avait pas souhaité faire figurer une défaite de Jeanne, et qui plus est, devant Paris. En revanche, Senlis était une victoire acquise le 16 août.


DSC05323

Jeanne d'Arc dans la cathédrale de Sens

photo de l'auteur

 

Le cortège traversa la rivière d'Yonne au « gué de Ronchevaux » situé entre Sainte-Colombe et le village de Saint-Martin-du-Tertre. Odoranne, moine et érudit de l'abbaye Saint-Pierre-le-Vif de Sens au XIIe siècle, parlait déjà dans ses écrits de ce passage sur la rivière. De l'autre côté, les contreforts du Gâtinais attendaient le convoi qui prit la direction de Courtenay, Château-Renard, Montargis puis de Gien sur la Loire où il arriva le 21.


Le bulletin n°4 de la Société d’Émulation de l'Arrondissement de Montargis de 1923 précise en parlant de l'une des portes de sa ville close :

« Jeanne d'Arc passa quatre fois sous cette porte : le 28 février 1429, allant à Gien pour se rendre à Chinon ; le 28 juin 1429, allant au sacre de Reims ; le 18 septembre de la même année, au retour du sacre, et dans les premiers jours d'avril 1430... ».


Le 3 septembre 1428, Jean Dunois, compagnon de Jeanne, avait battu Warwick à Montargis. Dans la première partie concernant le siège de Sens en 1420, nous avions fait la connaissance du sire de Guitry alors commandant et gouverneur de la place. C'est ce partisan de Charles VII qui sera choisi pour reprendre les rênes de la cité. Il offrira en 1429 un gîte sûr au convoi royal.


Virail Jeanne d'Arc Eglise de la Madeleine

Vitrail dans l'église de la Madeleine de Montargis

Charles VII et Jeanne d'Arc à Montargis le 19 septembre 1429

 

Suivant le témoignage de Monstrelet, l'escorte de Jehanne et de Charles VII, ce jeune roi de vingt six ans, était particulièrement brillante :

  • le connétable Arthur de Richemont, duc de Bretagne et de Touraine, qui avait épousé six ans plus tôt Marguerite de Bourgogne, fille ainée de Jean sans Peur !

  • Charles d'Anjou, comte du Maine, beau-frère et grand favori du roi,

  • Jean Dunois, dit « le bâtard d'Orléans »,,

  • Bernard d'Armagnac, marié à Éléonore de Bourbon, duchesse de Nemours,

  • Charles d'Albret,

  • et bien d'autres nobles et puissants barons ...

Une estimation, toute personnelle, réalisée suite à de nombreuses lectures, porterait son armée à environ 10 000 hommes au début de 1429. Tout porte à croire que ce nombre est à diviser par 2 ou 3, peut être plus, à la fin de la dite année, lors du licenciement du reste de la troupe à Gien par le roi Charles VII.


Ouvrages consultés

1/ COUGET Henri (chanoine), Jeanne d'Arc devant Paris, édition Spes à Paris, 1925

2/ GALLO Max, Jeanne d'Arc, XO édition, 2011

2/ MIGNARDOT Andrée, Histoire d'un village du nord-sénonais Michery, éd. Chevillon à Sens, 1996

3/ MONSTRELET Enguerrand de, Chroniques de Monstrelet, 1400-1444 avec notice biographique et littéraire par J.A.C. Buchon. édition Buchon, 1875

4/ PARAT Alexandre (abbé), Jeanne d'Arc dans les pays de l'Yonne, BSSY, tome 64, 1910

5/ ROY Maurice, La chevauchée de Jehanne d'Arc, Bulletin de la Société Archéologique de Sens, tome XXXVIII, 1936

 

Site remarquable

Société d’Émulation de l'Arrondissement de Montargis (SEM)

http://gatinais.histoire.pagesperso-orange.fr/


A signaler

2 magnifiques revues d'histoire sont consacrées à Jeanne d'Arc :

1/ la Nouvelle Revue d'Histoire, H.S. N°5 automne-hiver 2012 a pour titre « 1412-2012, Jeanne d'Arc, Une passion française », pour le 600e anniversaire de sa naissance le 6 janvier 1412.

2/ « Jeanne d'Arc et la guerre de Cent Ans » n°3 de novembre, décembre, janvier 2013.

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23 décembre 2012 7 23 /12 /décembre /2012 21:39

1420, le siège de SENS

 

Depuis la défaite d'Azincourt en 1415, HENRY V roi d'Angleterre allait de victoire en victoire. Sens n'échappe pas à la règle. Dès 1417, les Anglais sont aux portes de la ville et en saccagent les faubourgs. Ils incendient l'Abbaye Saint-Jean, la basilique Saint-Savinien et l'église Notre-Dame du Charnier.


Tout commence à Montereau ....


Le 10 septembre 1419, Jean sans Peur est assassiné sur le pont de Montereau, ville du Sénonais, lors d'une entrevue avec le dauphin, le futur roi CHARLES VII, chef de file des Armagnacs. Par vengeance, cet événement décidera son fils Philippe le Bon, duc de Bourgogne, à faire alliance avec l'Anglais.

 

Assassinat de Jean sans Peur2

 

L'infecte traité de Troyes

Des négociations préliminaires se tiennent le 9 avril. Le mois suivant, le 21 mai 1420, le traité de Troyes est signé. Il prévoit qu'après la mort du roi CHARLES VI, la couronne de France reviendra à son gendre le roi d'Angleterre, HENRY V. En d'autres termes, le futur CHARLES VII est déshérité.

 

En exécution de ce traité, l'Archevêque de Sens HENRI de SAVOISY marie le 2 juin 1420 vers midi, dans la cathédrale Saint-Pierre et Saint-Paul de Troyes, HENRY V roi d'Angleterre avec CATHERINE de France, fille du roi Charles VI et d'Isabeau de BAVIERE. De cet événement déshonorant pour l'archevêque, une phrase est restée célèbre : « Vous m'avez donné une femme, je vous rends la vôtre » dit le roi HENRY à l'archevêque de Sens en lui remettant son église.

 

HENRY V, à qui l'on parlait de joutes qui devaient compléter la fête de ses noces, avait répondu qu'il valait mieux aller sans retard attaquer Sens, afin que chaque chevalier puisse y faire preuve de courage.

 

Le siège de Sens


La ville reste fidèle au Dauphin, futur roi CHARLES VII. La défense de la ville est sous le commandement du sire de GUITRY, alors bailli et gouverneur de la place, et de ses gens d’armes. Le siège durera 12 jours, avant que la ville ne se rende. Sens devient anglaise pour 9 ans.

 

Francais 82, fol. 59, Siege de Sens (1420)

 

Siège de Sens (1420)

Jean de Wavrin, Chroniques d'Angleterre.

Maître du Boèce flamand, enlumineur., Gand, vers 1480-1485.

Provenance : Louis de Gruuthuse.

Paris, BNF, Mss, fr. 82, f. 59

 

Le 6 juin 1420 le siège de Sens avait commencé. Un chroniqueur britannique, Jehan OFORT, présent ce jour là, détaille les évènements passés et présents. Il précise :

« Cette ville est dignement assiégée, car il y a deux rois, deux reines, quatre ducs, avec monseigneur de Bedfort quand il viendra, lequel doit se mettre en route de Paris, le 12 du mois de juin. A ce siège assistent un grand nombre de dames et de gentils-hommes, tant anglois que françois, dont plusieurs ont fait leurs premières armes il y a long-temps mais qui se trouvent à un siège pour la première fois ».

 

Sens capitulera le 11 juin 1420. Ce jour là, HENRI de SAVOISY, Archevêque de Sens est intronisé officiellement dans la cathédrale. Il a pour témoins les deux rois, les deux reines et le duc de Bourgogne. Cet ecclésiastique décèdera en 1422 en emportant dans la tombe la honte d'avoir consacré l'acte préliminaire de l'invasion de la France.

 

Lorsque HENRY V arriva à Paris, il réunit les représentants des villes conquises pour fixer le montant des subsides. Les députés de Sens à cette assemblée étaient : Pierre d'ANGERS, abbé de Saint-Pierre-le-Vif, le préchantre Jean Le MASLE, André CLEMENT et Jean PICARD, avocats. Si le chapitre métropolitain était contraint de s'incliner devant le vainqueur, il restait attaché au Dauphin.

 

Dans la grande Sénonie, d'autres villes vont tomber, et passer aux mains de l'ennemi. Le 1 juillet 1420, c'est Montereau ; le 7 juillet le siège est mis devant Melun qui tombera le 17. L'année suivante, le 27 septembre 1421, c'est au tour de Villeneuve-le-Roi, où HENRY V laissera une garnison chassée en 1430. Dans l'intervalle, des partisans du futur CHARLES VII tenteront une entrée dans la ville en escaladant le mur du côté de la porte Saint-Rémi. Toutes les tentatives seront repoussées.

 

La monnaie


Le 12 octobre 1419, le Dauphin baille à ferme les monnaies existantes à MAROT de BETONS pour un an. Ces « florettes » étaient frappées dans 22 ateliers différents répartis dans des villes ralliées à sa cause, dont Sens.

 

Florettes de Charle VI

 

(Je ne suis pas compétent pour dire si ces Florettes sont celles frappées à Sens ? )

 

 

Querelles autour d'un archevêque


Après la mort de l'archevêque de Sens, JEAN de MONTAIGU est tué à la bataille d'Azincourt le 22 octobre 1415, une partie du chapitre de la cathédrale avait élu HENRI de SAVOISY sur le conseil du Duc de Bourgogne. L'autre partie avait porté son choix sur Jean de NORRI, soutenu par la cour de France. Après son décès, un certain Raimond fut avancé pour prendre sa place. Il s'ensuivit une série de querelles dans les milieux ecclésiastiques sénonais. La situation trainait en longueur sous la pression des deux camps. On décida donc de faire appel à l 'église de Lyon pour trancher cette affaire. Enfin le Pape Martin V, ayant pris connaissance de l'affaire, confirma HENRI de SAVOISY dans ses fonctions.

 

 

Ouvrages consultés


  • BARANTE de, Histoire des Ducs de Bourgogne de la Maison de Valois, 1364-1477, tome premier, Société Typographique Belge, 1838
  • BENEUT Guy, Une florette de Charles VI frappée à Sens, revue numismatique, 1958
  • BITTON Frédéric, Histoire de la ville de Sens, réédition de l'originale de 1943, éditions du Bastion à Paris, 1989
  • BOUVIER Henri abbé, Histoire de l’Église et de l'Ancien Archidiocèse de Sens, tome II de 122 à 1519 ; imp.Yvert et Tellier à Amiens, 1911
  • LARCHER de LA VERNADE Charles, Histoire de la ville de Sens, réédition de l'original de 1846, éd.Culture et civilisation à Bruxelles, 1976
  • LETTENHOVE Kervyne de, Académie Royale de Belgique, tome premier, Œuvre de Georges CHASTELLAIN, Chronique 1419-1422, éd.Heussner à Bruxelles, 1863.
  • LONGUEVAL, FONTENAY, BRUMOY et BERTHIER, de la Compagnie de Jésus, Histoire de l’Église Gallicane dédiée à nos seigneurs du clergé, tome XX, éd.Gaume frères à Paris, 1827
  •  PIGNARD-PEGUET Maurice, Histoire de l'Yonne, librairie de l'Histoire générale illustrée des départements à Paris, 1913
  •  URSINS Jean Juvénal des, Histoire de Charles VI, Roy de France, et des choses mémorables advenuës durant 42 années de son Règne, depuis 1380 jusques à 1422, Paris, Imprimerie Royale à Paris, 1653
   
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16 novembre 2012 5 16 /11 /novembre /2012 18:00

Vers 1415, lors de la guerre de cent ans, on raconte qu'un matin à l'aube, le veilleur de nuit de la vieille Cité de SENONES cria :


« voiez l'ennemi … les anglais … !!! ….

 

  SAS Photos

 

 

Savinienne, une jeune fille du peuple, la première entendit ce cri d'alarme; elle courut à la cathédrale y chercher le mystérieux TAMBOUR d'ARGENT, le prit d'une main en criant : AUX ARMES ! ...

de l'autre, avec sa baguette l'en frappa si fort que ce bruit argentin, si étrange, répété mille fois par l'écho, parvint aux anglais qui, effrayés s'enfuirent au loin.

 

La ville était sauvée !

« Légende du XVe siècle »

 

Depuis ce jour mémorable, une rue de Sens proche de la cathédrale, évoque ce haut fait historique !


DSC00193

 

On notera l'écriture ancienne :

RVE DV TAMBOVR D'ARGENT

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13 novembre 2012 2 13 /11 /novembre /2012 07:02

Comme nous l'avons déjà évoqué, les Sénons sont arrivés avec les Celtes entre le VIIe et le Ve siècle avant J-C. Dans le cas présent, un certain nombre d'entre eux vont aller s'établir sur des terres déjà habitées au confluent du ru de Vallan et de l'Yonne, L’existence d'Auxerre dans la haute antiquité est réelle, mais aucune preuve archéologique ne peut l'attester. Elles sont très sûrement présentes, mais enfouies sous les habitations actuelles.

La cité d'Auxerre tire son nom d'une ville celtique ou sénone nommée Autricus. Son nom est attesté par une inscription trouvée dans des fouilles au XIXe siècle. Le mont Autric, aujourd'hui la place de l’arquebuse, est probablement à l'origine du nom. Avec l'invasion romaine, elle prendra le nom d'Autessiodurum ou Autosidurum (a).


(a) orthographe rencontrée dans les écrits d'Ammien-Marcellin. et par l'auteur de l'itinéraire d'Antonin.

 

 

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  Photo de l'auteur, avec l'autorisation du Musée d'Auxerre

 

En 27 avant notre ère, Auguste intègre le Sénonais dans la Gaule Celtique appelée aussi Gaule Lyonnaise avec Agedincum pour capitale de la civitas senonum dans laquelle Autricus trouve naturellement sa place comme ville étape entre Sens et Avallon.

Durant les deux premiers siècles, la « Pax romana » apporte paix et prospérité à la cité. Entre 40 et 50, la voie Agrippa, qui relie Lyon à Boulogne-sur-Mer, passe par Autessiodurum et participe à son développement. En plus de la voie d'eau, Auxerre peut compter sur une route rapide nécessaire pour les échanges commerciaux des produits agricoles, viticoles et artisanaux. Les archéologues ont mis au jour non loin de là, à Escolives-Sainte-Camille, un bas-relief du IIe siècle illustré de grappes de raisins. C'est la plus ancienne trace de vignoble dans la région d’Auxerre.

 

Vendangeur ailé déposant son raisin dans un panier d'osie

Photo de l'auteur

 

Vers 258, Pèlerin, citoyen romain de noble famille, vient évangéliser l’Auxerrois.


A partir de la fin du IIIe siècle, les menaces d'invasions se précisent. Dès le début des années 270, la ville est pillée et incendiée. L'empereur Valérien ordonnera que toutes les cités devaient se retrancher derrière des murs de fortification. Comme à Sens, toutes les merveilleuses réalisations romaines seront démontées pour participer à l'élévation de la muraille. Au nord du site primitif sera donc édifié une enceinte d'un peu plus de 4 000 mètres de périmètre flanquée d'une dizaine de tours. A certains endroits, l'épaisseur du mur mesurait jusqu'à 3,40 mètres.

Plus tard au IVe siècle viendra s'ajouter le castrum, enclos fortifié d'environ 1 100 mètres comprenant le palais comtal, et aujourd'hui la cathédrale et la rue de l'horloge.

 

Auxerre Castrum

Document Wikipédia

 

L’emplacement des tours est connu. Celle de Saint-Pancrace, à l’angle sud-est, existe toujours. Le reste de la tour d’Orbandelle a été démoli au début du XIXe siècle.

 

AUXERRE - Vestiges d'enceinte gallo-romaine-copie-1 

 

Dès 297, le vicus commence à se développer stimulé par la nouvelle organisation administrative de Dioclétien. Érigé en chef-lieu de circonscription, Auxerre va se séparer définitivement du Sénonais administratif, pour devenir chef-lieu de civitas sous l’autorité d’un comite (a). La ville et l'Auxerrois continueront néanmoins à dépendre de l’archevêché de Sens.

(a) racine latine : cum = avec, nom commun : comes, comiitis = compagnon, personne de la suite. C'était un haut fonctionnaire impérial. Ce mot sera à l'origine du Comte.

 

Ouvrages consultés

Cartulaire général de l'Yonne, sous la direction de Maximilien QUANTIN, deuxième volume,  Perriquet et Rouillé imprimeur à Auxerre, MDCCCLX.

 

LEBLANC DAVEAU Émile, Recherches historiques et statistiques sur Auxerre, ses monuments et ses environs, Imp.Gallot, 1871

 

 

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17 juin 2012 7 17 /06 /juin /2012 11:30

J'évoquais les instruments de musique de l'orchestre qui accompagnaient les spectacles dans l'article sur l'amphithéatre de Sens.

En compulsant internet à l'adresse : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5731957q

je viens de trouver l'ouvrage suivant pour lequel je pense qu'un petit article est justifié :

 

« La musique » de Casimir COLOMB

Collection « Bibliothèque des Merveilles »

publiée sous la direction d'Edouard CHARTON

1878

 

  L'auteur présente des dessins d'instruments anciens. Il en propose deux concernant des orgues antiques conçus par Vitruve (a) ou par Ctésibios (b).


On attribue aux deux l'invention d'une mécanique élaborée faisant appel à la mécanique des fluides, concrètement ici de l'eau courante qui produit au final de l'air dans les tuyaux. Cependant, on ne peut pas dire si Vitruve a appliqué ou modernisé le système de Ctésibios appelé hydraule, ou s'il est l'inventeur d'une autre mécanique faisant également appel à l'eau.


(a) Vitruve « de architectura » livre X, §8

(b) Ctésibios est né au IIIe siècle avant.J-C à Alexandrie. On ne connait pas ses dates de naissance et de décès. Il est considéré comme le fondateur de l'école des mécaniciens grecs d'Alexandrie.

 

A mon prochain voyage au musée d'Arles, j'irai voir ces inventions et si possible prendre des photos que je vous proposerai.


 

Orgue antique 1

 

 

Orgue antique 2

 

 

Pour terminer,  je voulais rendre un hommage à Edouard CHARTON qui a dirigé cette collection. C'est un illustre sénonais, journaliste, directeur de publications, et homme politique né à Sens le 11 mai 1807 et décédé à Versailles le 27 février 1890.

 


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12 juin 2012 2 12 /06 /juin /2012 19:36

MELUN METLOSEDUM est le deuxième oppidum gaulois du pays des Sénons dont parle Jules César dans « La Guerre des Gaules » (1), avec AGENDICUM déjà largement évoqué dans ce blog, et VELLAUNODUNUM dont nous parlerons ultérieurement.


Oppidum, pas certain !

Silvio LUCCISANO (2) signe un article passionnant intitulé « A propos de l'oppidum sénon de Metlosedum » dans lequel il suggère de revoir le concept de l'oppidum en lui donnant un sens de « lieu de rassemblement ». Très intrigué par cette proposition, j'ai aussitôt consulté mon GAFFIOT (9). Effectivement, j'ai maintenant quelques doutes sur une possible fortification de l'île pendant l'âge de fer, puis pendant la pax romana.

Plus tard un rempart est attesté. Il sera édifié pendant les grandes invasions, époque où toutes les villes se retranchent derrière des murailles, à l'image d'Agendicum (a). Pour la deuxième réponse, il s'agit bien d'une civitas, mais pas d'un chef lieu. C'est la raison pour laquelle certains auteurs ont traduit dans de bello gallico le mot oppidum par ville.

(a) voir l'article « La muraille de Sens », dans ce blog


Les interrogations sont nombreuses

Pour les archéologues, elles résident aujourd'hui dans l'absence de traces archéologiques sur l'île Saint-Etienne avant la période augustéenne, et dans une récolte assez modeste d'objets archéologiques sous la ville actuelle.

Depuis le milieu du XIXe siècle de nombreux spécialistes ont émis des avis différents sur le nom de la cité d'origine et sur son emplacement.

 

Evolution du nom

Le dictionnaire de la langue gauloise de Xavier DELAMARRE (3) décompose le nom en Metelo-sedum qu'il traduit par La résidence des moissonneurs. Au IIIe siècle sur l'itinéraire d'Antonin, Melun est mentionné sous le nom de Mecleto, et sur la table de Peutinger Meteglo. BRUNET de PRESLE (4) en 1857 va jusqu'à évoquer des erreurs de copistes au Moyen Age et annonce les noms Melledunumou et Melodunum. Des éditions anciennes de « de Bello Gallico » donnent le nom de Metiosedum. Ce sont là les noms qui reviennent le plus souvent.


En ce qui me concerne, je reste fidèle à L.A.CONSTANS qui propose Metlosedum.(1).  Paul-Marie DUVAL qui a signé la préface de l'ouvrage, ajoute une note pleine d’intérêt que je transcris ici intégralement : « Melun a eu deux noms, probablement successivement « Metlosedum : Demeure de Metlos », et Metlodunum ou Mellodunum, qui a donné Melun ».

Le nom de Metlosedum semble attesté aujourd'hui par la dédicace d'un temple au dieu Mercure.(en 3 morceaux) datée de 250 après J-C, et dont les latinistes ont proposé la restitution suivante :

 

Metlosedum Mercure

 

(Numini Augusti, deo Mercurio et

vico Metl)osedi (--- templ)um dei

Mercuri cum suis aedific(iis ---) /

cura (---?) Auspicis praef(ecti)



A la divinité impériale, au dieu

Mercure et au vicus de

Metlosedun, --- un temple du

dieu Mercure avec ses annexes, ---

par les soins du préfet Auspex.

 

Approche géographique et hydraulique

On pourrait chercher des similitudes entre l'île Saint-Étienne de Metlosedum, l'Ile de la Cité du Lutetia Parisiorum et de l'île d'Yonne d'Agendicum, mais la comparaison ne reflèterait pas la réalité de l'époque.


Je préfère consulter des cartes géographiques pour constater que l'île Saint-Etienne est la seule des trois à être située dans un méandre de la rivière. Cette position est la plus favorable pour la concentration d'alluvions, et à terme la formation d'îles ou d'îlots.


Aujourd'hui toutes les rivières sont canalisées, leurs débits sont régulés par des écluses, barrages et autres moyens sur toute leur longueur ou presque. La seule exception à la règle reste la Loire qui, sur de grandes distances, est livrée a elle même avec ses niveaux intempestifs, ses mouvements d'eau dangereux et le déplacement de ses bancs de sable. La présence de nombreuses îlots quelquefois éphémères en est une parfaite illustration. Je suis persuadé que la Seine d'hier ressemblait à la Loire d'aujourd'hui. S'il est tout à fait certain qu'une île existait en 52 avant J.C grâce au récit de César, par contre il est difficile aujourd'hui de la situer avec exactitude, et de lui donner une taille.. 

 

Fouilles dans la rivière

De 1990 à 2004, le GRAS Groupement de Recherches Archéologiques Subaquatiques a apporté des éléments fort intéressants pour l'étude du site. Sous le pont Leclerc, ils ont découvert les restes des pieux en bois d'un pont remontant à l'époque gauloise (IIe siècle avant J-C). On aurait peut être là le premier indice.


Les spécialistes ont également remonté une stèle gallo-romaine représentant un personnage monté sur un quadrupède.


Pour d'autres plongées avec les archéologues, je renvoie les lecteurs à l'excellent site internet référencé ci-après. Il donne un accès (en format pdf) au passionnant article de Philippe BONNIN (5). .http://archsubgras.free.fr/sitesseine/pmelun.html

 

La prise de Metlosedum

Dans l'article « LABIENUS chez les SENONS », nous avons vu que César avait décidé de faire hiverner ses légions à Sens Agendicum à la fin 53, début 52 avant J-C. L'installation terminée, il était reparti pour Rome faire son rapport devant les sénateurs laissant les pleins pouvoirs à son lieutenant.

 

Labienus wikipedia


Pendant ce temps, averti de la formation d'une coalition aux environs de Lutèce menée par Camulogène, chef des Aulerques, Labienus décide d'un raid sur la cité des Parisii. Sur le chemin, il s'empare de Metlosedum, dernière ville au nord du pays Sénons avant de pénétrer sur le territoire des Parisii.

Edifiée dans l'île Saint-Étienne, la cité était reliée à la rive par au moins un pont en bois, peut être celui dont nous avons parlé plus haut.


Avant de le transcrire, César avait lu le rapport de Labienus qui raconte ce qui suit :

« C'est une ville des Sénons située dans une île de la Seine comme nous venons de dire qu'était Lutèce. Labienus s'empare d'environ cinquante embarcations, les unit rapidement les unes aux autres et y jette des soldats. Grâce à la surprise et à la terreur des gens de la ville, dont un grand nombre d'habitants étaient partis pour la guerre, il se rend sans combattre maître de la place Il rétablit le pont que l'ennemi avait coupé les jours précédents, y fait passer son armée et fait route vers Lutèce en suivant le cours du fleuve ». (Guerre des Gaules, VII, 58)(1)

Il n'était pas très difficile de prendre la ville, tous les hommes en âge de se battre étant partis grossir la coalition. Mais en employant l'expression « les jours précédents », il prouvent que la prise de Metlosedum a duré plusieurs jours et a posé peut être quelques problèmes..

Dans les légions emmenées par Labienus il y avait des pontonniers comme dans une armée moderne capables de former un pont de bateaux, et de reconstruire le pont coupé.

 

Période gallo-romaine

C'est à partir de la période augustéenne, que la ville nouvelle se construit sur la rive gauche suivant un axe Meaux-Sens..A cet endroit, les archéologues ont mis au jour les fondations antiques d'un temple dédié à Mercure, d'un amphithéâtre, de thermes et l'emplacement de nécropoles (6).

La plupart des statues et stèles présentées au Musée de Melun proviennent du mur d'enceinte du Castrum du Bas Empire, et découvertes fin XIXe, début XXe siècle. Tout comme à Agendicum, la muraille a été construite avec les pierres des monuments. Il faut espérer que de nombreux autres merveilles restent à découvrir (6)(7).

 

Ici une tête de Mercure coiffée du pétase ailé (quelque peu abimé).

(a) dieu du commerce, des voyages et messager des autres dieux dans la mythologie romaine


DSC05020

 

L'économie de la cité

Comme dans toutes les agglomérations gallo-romaine, et auparavant dans celles de l'âge de fer, l'économie de la cité était tournée vers l'artisanat (6)(7).


La métallurgie - La très belle exposition temporaire de mai-juin 2012 à l'espace Saint-Jean présentait, entre autres, des objets et tableaux explicatifs concernant la métallurgie du fer et du bronze. Un atelier situé avenue Thiers a été daté du 1er siècle de notre ère.


La poterie - C'était l'une des activités artisanales les plus importantes de Metlosedum. Huit fours gallo-romains ont été recensés par les archéologues, mais seul le four du « Manège » a été restauré par le Groupe de Recherche Archéologique Melunais. Il est visible dans le jardin au pieds de la collégiale Notre-Dame. Sa fouille en 1974 a livré 60 kg de céramique (8). Il semble avoir été utilisé au IIIe siècle.

 

DSC05022.JPG

Poteries de Metlosedum, pas forcément réalisée dans ce four.

 

DSC04989 

La pêche - Si cette cinquantaine d'embarcations avaient servi à l'établissement d'un pont (voir ci-dessus), elles étaient nécessairement de belles tailles. J'imagine donc qu'elles pouvaient emmener une ou plusieurs personnes avec du matériel de pêche. Metlosedumétait très probablement aussi une cité de pêcheurs.


Documents consultés
  1. Jules CESAR, « La Guerre des Gaules », traduction de L.A.CONSTANS, chez Folio Classique n°1315, août 2010.- (Voir rubrique : La bibliothèque du blog)

  2. Silvio LUCCISANO, archéologue, président du Groupe de Recherche Archéologique Melunais (GRAM), et auteur de plusieurs ouvrages dont « Le Casque d'Agris »

  3. Xavier DELAMARRE, « Dictionnaire de la langue gauloise », édition Errance, mars 2001

  4. Wladimir BRUNET DE PRESLE, « Observations sur le nom de Metiosedum et sur le lieu de la bataille livrée par Labienus à Camulogène près de Paris » - Comptes-rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres,1857

  5. Philippe BONNIN, « Archéologie de la Seine dans le Melunais, bilan des recherches subaquatiques 1990-2004 », Bulletin du Groupe de Recherche Archéologique Melunais, n°1 de 2005.

  6. Ouvrage édité pour l'exposition 1990-1991, « Melun au temps de Rome »,

  7. Plaquette historique de l'exposition temporaire et du Musée, « Melun, une ville romaine sur la Seine » 2012

  8. Jean-Claude CHANEZ, Dr.Jean-Claude LE BLAY, Gérard NEMITZ, Richard ADAM, « Les potiers de Melun à l'époque Gallo-romaine », Archéologia n°149 de décembre 1980 

  9. Et bien évidemment ! Félix GAFFIOT, « Le Grand Gaffiot », Dictionnaire latin-français, Hachette, 2000

 

Sortir au Musée

Musée de Melun

Maison de la Vicomté

4 quai de la Courtille

77000 Melun

.

Tél. : 01 64 79 77 70.

messagerie : musee@ville-melun.fr

 

Ouverture à partir de 14h. Néanmoins, il est préférable d'appeler auparavant.

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28 avril 2012 6 28 /04 /avril /2012 06:31

Je vous ai présenté la dernière fois l'une des mosaïques gallo-romaines conservée dans les musées de Sens. Aujourd'hui je vous propose de nous rendre dans une autre salle afin de découvrir la stèle funéraire d'un artisan local à peu près de la même époque.


La stèle de Bellicus, le jeune forgeron


C'est une stèle remarquable, car il s'agit d'un personnage sculpté dans une niche semi-cylindrique avec arrière-voussure sphérique accompagnée de deux oreilles, comportant elles-mêmes des informations importantes. Chaque détail de l'ensemble a une signification précise que nous allons détailler ci-dessous.


Ses dimmensions hors tout sont modestes : 1 mètre de hauteur sur 0,50 de large et 0,40 d'épaisseur. Selon Julliot, elle daterait du milieu du IIe siècle après J-C. Elle avait été mise au jour en 1864, lors du démontage de la muraille, près de la porte Formau. Elle avait été arrachée à l'un des cimetières qui entourait la ville 17 siècle plus tôt pour l'édification des ramparts d'Agendicum (voir l'article sur la muraille de Sens).

 

79 - Jeune chaudronnier - Aux dieux Mânes et à la mémoir

Photo de l'auteur publiée avec l'autorisation des Musées de Sens


Description de la stèle

Le personnage tient son marteau d'une main, et de l'autre une lame de fer qu'il appuie sur une enclume supportée par une console.

A hauteur de son épaule gauche est suspendu une paire de tenailles, et à droite un tisonnier. Ces détails sont impossibles à voir sur la photo, mais existent réellement. Aujourd'hui, il s'agit d'empreintes peu distinctes. On peut supposer que cette stèle a subi les outrages du temps depuis sa découverte au XIXe siècle, ou bien un nettoyage qui l'a fortement endommagée.

A ses pieds, un chien semble être à l'arrêt devant un lièvre de l'autre côté, ce qui pourrait laisser penser à la chasse.

 

79 - DSC04878

L'inscription

Sur les oreilles et le cintre de la niche, on peut lire :


D.                                               (M).

MEMOR(iae) BELLICCI BELLATOR (is filii)


Aux Dieux Mânes 

A la mémoire de Belliccus fils de Bellator

 

Comme dans la plupart des cas, elle commence par une dédicace aux dieux Mânes Dis Manibus, D.M. en abrégé. Dans la religion romaine les âmes des morts ou Mânes étaient l'objet de préoccupations constantes et donnaient lieu à des cérémonies publiques et privées tout au long de l'année. L'une d'entre elles appelée Féralia, célébrée à la fin février, durait 10 jours pendant lesquels toute la vie sociale était suspendue, les temples fermés, les autels éteints et les mariages interdits. Cette référence restera jusqu'au début de l'époque chrétienne et même au-delà.

 

Cette inscription est suivie d'une épitaphe qui apporte de nombreux renseignements sur le défunt, sa profession, sa position sociale, sa famille, son origine ... Ces témoignages épigraphiques sont malheureusement trop peu nombreux.


Analyse des noms


Le nom Bellicus est en latin un nominatif masculin singulier que l'on peut traduire ici par guerrier ou combattant, nom donné à ce jeune forgeron (faber). Cette indication est intéressante dans la connaissance des activités de ce jeune artisan.

Le latin nous apprend également l'activité de son père Bellator. C'est aussi un nominatif ou un vocatif masculin singulier, qui peut être aussi traduit par guerrier ou combattant.

Ces noms ne sont pas romains, mais très probablement des surnoms donnés à des Sénons enrolés de gré ou de force dans la légion. Par la suite, ils les ont conservé, car la mode de l'époque était aux coutumes romaines.


Description vestimentaire et coiffure

 

La coiffure de Bellicus est un mélange de deux modes : la romaine avec les cheveux court sur le dessus, et gauloise pour les cheveux long par derrière. On distingue sur la photo des mèches tombant sur les épaules.

Son vêtement n'est pas celui qu'il porte à la forge chaque jour. Le sculpteur le fait poser avec un habit composé d'une tunique et d'un ample manteau appelé généralement lacerna qui descend à mi-jambe. Deux ouvertures aménagées dans la cape lui permettent de passer les bras. Ce vêtement est de coupe gauloise.

Seul mystère non encore résolu, il ne porte qu'une seule chaussette au pied, l'autre étant nu.. Si mes lecteurs ont une idée sur la question, je suis preneur d'une explication !!!

 

Essai d'interprétation de la stèle


Bellicus et son père Bellator servaient tous les deux dans la légion romaine en tant que combattants, mais aussi et surtout comme forgerons des armées qui créent et entretiennent les armes du régiment. Avant leur incorporation, c'était déjà leur métier à Agendicum.

Suite à un évênement important, blessure, invalidité ou même fin de la période militaire obligatoire, ils sont rentrés chez eux et ont réouvert leur forge. Ils travaillent toujours l'armement, mais se sont spécialisés pour celui pour la chasse.

Apparemment ils vivent bien, l'affaire est prospère, car seuls les gens aisés se font faire une stèle.

 

C'est un très petit aperçu des magnifiques collections gallo-romaines des Musées de Sens. J'encourage vivement tous ceux qui le peuvent à venir découvrir les trésors qu'ils renferment.

 

Ouvrages consultés
  1. Gustave JULLIOT, « Inscriptions et Monuments du Musée Gallo-romain de Sens », ouvrage publié par la Société Archéologique de Sens, éditeur Duchemin à Sens, 1898
  2.  Publication du CRDP de Reims, « Rites et monuments funéraires chez les Gallo-romains », 1988  
  3.  L'Archéologue, n°119 d'avril-mai 2012, « Les Gallo-Romains vus par eux-mêmes » 
  4. Félix GAFFIOT, « Le Grand Gaffiot », Dictionnaire latin français, Hachette, 2000

 


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9 avril 2012 1 09 /04 /avril /2012 09:39

Dans « La bibliothèque du blog », je pense qu'il était utile de faire le point sur les principales revues sur les GAULOIS parues ces derniers mois.

 

Pour ceux qui hésiteraient encore, le hors série n°1 « Les Gaulois » est une vraie réussite. Tous les articles sont de grande qualité. L'un d'entre eux, sous la plume de Jean-Jacques GRIZEAUD, est intitulé « Les Gaulois Sénons ». Il offre un résumé rapide mais très clair et remarquablement illustré de la vie de ce peuple arrivé avec les Celtes entre le VIIe et le Ve siècle avant J-C.

Le n°2 est prévu dans les kiosques à partir du 23 juin.

 

Les Gaulois1

 

 

Le Hors Série n°14 de la revue ARCHEOLOGIA traite d'ALESIA à l'occasion de l'ouverture du MuséoParc. Cette formidable réalisation bourguignonne, après Bibracte et Vix, mérite une visite approfondie.

VERCINGETORIX a été le premier chef gaulois a avoir su fédérer tous les peuples de l'hexagone contre l'envahisseur romain. La défaite d'Alésia a été en fait la victoire de l'unité, et le premier acte politique important de notre pays.

 

Les Gaulois4

 

La revue l'ARCHEOLOGUE n°118 de février-mars présente « Les peuples gaulois ». En dehors d'un article passionnant sur les monnaies, ce numéro apporte un éclairage tout à fait intéressant sur la vie de nos ancêtres.

 

Les Gaulois3


Je cite ci-dessous 5 autres revues toutes aussi intéressantes. Certaines ne sont plus en kiosques, mais vous pouvez soit les commander, mais aussi les consulter dans la plupart des bibliothèques municipales.

 

  1. TELERAMA, numéro hors série d'octobre 2011, « Les Gaulois, une passion magique »
  2. Les Cahiers de SCIENCES ET VIE, n°125 d'octobre-novembre 2011, « Les Gaulois, qui étaient-ils »
  3. ARCHEOLOGIA, n°492 d'octobre 2011, « Expo à la Cité des Sciences, les Gaulois, trente an ans de recherches en europe »
  4. Les DOSSIERS D'ARCHEOLOGIE, numéro 21 hors série, d'octobre 2011, « Les Gaulois, la fin d'un mythe »
  5. ARCHEOLOGIA, n°497 de mars 2012, « Les Gaulois », nouvelles salles à Saint-Germain-en-Laye
 
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  • : Sens et le Sénonais antique et médiéval
  • : Histoire et Archéologie antique et médiévale d'un territoire immense constitué par les départements de l'Yonne, de la Seine-et-Marne, et d'une partie du Loiret et de l'Aube. Sa capitale s'est appelée successivement Agedincum, Senones, puis SENS.
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